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23/12/2012

Arsène Lupin revient

    • Arsène Lupin revient

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      Par Blaise De Chabalier (sur le site http://www.lefigaro.fr/livres/2012/05/22/03005-20120522AR...)Mis à jour le 23/05/2012 à 16:10 | publié le 22/05/2012 à 12:16 Réactions (3)

      Les Éditions Balland publient, mardi, l'ultime aventure du gentleman cambrioleur, dont le tapuscrit dormait dans un placard depuis des décennies.

      C'est une première. Jamais, depuis la mort de Maurice Leblanc, survenue en 1941, alors qu'il avait soixante-dix-sept ans, un inédit d'une aventure d'Arsène Lupin n'avait été publié. Or là, coup de théâtre, les Éditions Balland, avec l'accord de Florence Leblanc, la petite-fille du créateur du gentleman cambrioleur, publient, le 22 mai, Le Dernier Amour d'Arsène Lupin. De quoi faire saliver tous les «lupinophiles» de France et du monde entier. Reste à comprendre comment le tapuscrit de cet ultime roman, écrit entre 1936 et 1937, a bien pu rester dans un placard pendant des décennies.

      À la mort de sa mère, Denise, en 1999, alors que son père, Claude, était décédé en 1994, Florence Leblanc vide l'appartement parisien de ses parents. Elle récupère au passage les papiers personnels de son grand-père Maurice. «J'ai entreposé ses dossiers dans mon appartement, à Neuilly-sur-Seine, puis je n'y ai plus songé. Je savais qu'il y avait des écrits de mon grand-père, dont une aventure d'Arsène Lupin que j'avais lue, mais je ne les pensais pas susceptibles d'être publiés», confie la petite-fille du romancier.

       

      «Le dernier amour d'Arsène Lupin», de Maurice Leblanc. Editions Balland, 206 p., 17,90 €.
      «Le dernier amour d'Arsène Lupin», de Maurice Leblanc. Editions Balland, 206 p., 17,90 €.

       

      Un déclic

      Mais au printemps dernier, alors que le soixante-dixième anniversaire de la mort du célèbre écrivain annonçait l'entrée de son œuvre dans le domaine public, au 31 décembre 2011, un déclic se produit. Jean-Claude Gawsewitch, patron des éditions du même nom et de Balland, qui avait entendu parler de l'inédit oublié, réussit à convaincre l'héritière de Maurice Leblanc de le publier enfin. Gawsewitch a obtenu cet accord alors qu'il préparait, avec Florence Leblanc, la réédition, sous la forme d'un beau livre et dans leur version originale, des Aventures extraordinaires d'Arsène Lupin.

      L'existence du fameux tapuscrit était connue d'un petit nombre de personnes depuis la fin des années 1980. C'est à cette époque que ­Jacques Derouard, éminent spécialiste d'Arsène Lupin, apprend son existence de la bouche de Claude Leblanc, avec qui il s'entretient dans le cadre de la préparation d'une biographie de l'écrivain. «J'ai alors lu non seulement l'inédit qui va être publié, mais aussi plusieurs pièces de théâtre, des poésies, ainsi que l'ébauche d'un roman historique intituléLa Guerre de Mille Ans», raconte le passionné, qui évoque aussi une autre aventure de Lupin, Quatre filles et trois garçons, œuvre inachevée dont de nombreux éléments sont repris dans Le Dernier Amour d'Arsène Lupin. Puis Derouard explique que Claude Leblanc ne souhaitait pas publier cet inédit, pas plus que les autres, d'ailleurs: «Il considérait que ce roman n'avait pas la qualité deL'Aiguille creuse, véritable chef-d'œuvre, ni des autres Lupin.»

      Mais s'il n'est certes pas totalement abouti, ce qui se comprend d'autant mieux que Maurice Leblanc, alors vieillissant, fut vic­time d'une petite attaque cérébrale alors qu'il n'avait pas fini de le corriger,Le Dernier Amour d'Arsène Lupin offre toutefois une lecture très agréable. Et sa grande originalité, qui lui confère tout son intérêt, tient au fait qu'il présente le fameux héros dans un rôle totalement nouveau. L'escroc au grand cœur éduque en effet des enfants pauvres de la «Zone» misérable située au nord de Paris.

      Une très grande modernité

      Pas étonnant donc, qu'en relisant, il y a un an, le tapuscrit corrigé de la main de son grand-père, Florence Leblanc fût très agréablement surprise: «Le personnage d'Arsène Lupin m'a donné l'impression d'une très grande modernité. Il se glisse dans la peau d'un d'éducateur pour jeunes en difficulté. Or ces gamins vivent dans une banlieue qui ressemble assez à celle d'aujourd'hui.» Elle ajoute qu'elle a tenu à ce que le tapuscrit soit publié dans son état d'origine, sans aucune retouche. Quant à la préface, elle est signée par l'incontournable Jacques Derouard.

      Ce dernier avoue, dans un sou­rire, qu'il regrette tout de même un peu de ne plus être désormais le seul, ou presque, à avoir lu la dernière histoire de Lupin. Quant au cercle de ceux qui connaissaient l'existence de cet inédit, sans l'avoir lu, il s'était élargi avec le temps, en particulier aux membres de l'Association des amis d'Arsène Lupin (AAAL). «Je connais l'existence de ce texte depuis une dizaine d'années, et nous en avons parlé régulièrement entre nous», confie le président de l'AAAL, Pierre-Antoine Dumarquez. Puis, en 2001, l'information est plus largement diffusée, quand Jacques Derouard publie un dictionnaire dans lequel il répertorie l'ouvrage oublié.

      Quant aux autres inédits de Maurice Leblanc, qui pourraient donner naissance à un volume d'environ 1 200 pages, seront-ils publiés un jour? Si Jacques Derouard, qui les a tous lus, juge leur qualité impar­faite, il reconnaît toutefois qu'il y aurait au minimum un intérêt universitaire et historique à les faire connaître.

       


      Le roman d'un héros assagi

      Cette aventure inaboutie ne ressemble à aucune autre, mais permet de retrouver un délicieux personnage.

      Dommage queLe ­Dernier Amour d'Arsène Lupinne soit pas complètement abouti. C'est d'autant plus regrettable que cet ultime roman possède tous les éléments pour faire un chef-d'œuvre. Mais Maurice Leblanc, diminué physiquement, n'a pas pu achever de corriger le tapuscrit, de le reprendre longuement à la main, comme il le faisait habituellement. Reste que si l'on sent que les différentes pistes lancées pour nouer l'intrigue ne sont pas toujours complètement développées, et que certains passages revêtent la forme d'un script, il demeure le plaisir de retrouver toutes les caractéristiques d'Arsène Lupin, dans une aventure qui ne ressemble à aucune des précédentes. Notamment parce que tous les personnages, autour du héros, sont nouveaux.

      Si l'honneur, le courage, le désintéressement ou encore l'élégance et l'humour sont comme d'habitude présents, cette fois-ci, le plus distingué des escrocs se glisse pour la première fois dans la peau d'un éducateur pour gamins miséreux. Dans ce rôle, il va tout faire pour empêcher de mystérieux ennemis, sans doute des Anglais, de s'emparer d'un livre précieux qu'il tient de son grand-père, le général Lupin, qui fut un officier de Napoléon. L'occasion pour un Lupin, plus idéaliste que jamais, d'affirmer un esprit pacifique inédit, alors qu'il est confronté au directeur des services secrets de Sa Gracieuse Majesté: «Je ne rêve moi que d'aider à l'établissement de la paix universelle (…). La paix est possible (…), elle doit régner partout un jour.»

      «Combattre l'ivrognerie, l'oisiveté»

      Et quand Lupin le travailleur social se présente fièrement à un juge d'instruction qui le soupçonne d'avoir volé quelques sacs d'or, pour la bonne cause bien sûr, avec l'aide de ses bambins, il déclare: «Capitaine André de Savery, officier de réserve, instructeur bénévole des groupes scolaires de la banlieue nord de Paris, connu ici sous le nom de capitaine Cocorico.» Notons que ces deux surnoms n'ont jamais été utilisés auparavant. Soulignons également, qu'après avoir décrit la misère des classes populaires des années 1920, Maurice Leblanc laisse Lupin expliquer au juge sa méthode d'éducation: «Maître d'école, pion, le mot ne fait rien à l'affaire. Toujours est-il qu'ils m'obéissent comme des hommes disciplinés et qui comprennent la nécessité et la beauté de la discipline. Je leur apprends la morale civique, l'énergie, la propreté, la fierté, quelques notions de vie intérieure. Tout ce petit monde (…) évolue (…) et, grâce à eux, j'introduis dans la famille des principes par lesquels je cherche à élever le niveau, à combattre l'ivrognerie, l'oisiveté.»

      Enfin, si Lupin a bien souvent été amoureux, il semble cette fois succomber pour toujours aux charmes de la ravissante Cora de Lerne. «Ils se regardèrent longtemps, avec une douceur infinie. Elle lui tendit les deux mains, et, sentant qu'elle l'attirait, il s'inclina et lui baisa les lèvres, d'un baiser qui la fit retomber sans force sur l'oreiller (…)», écrit Leblanc avec une sensualité bien plus appuyée que d'habitude. Cette nouvelle héroïne est finalement la première à se marier avec Lupin en connaissant son véritable nom. Par le passé, l'aristocrate au cœur d'artichaut s'était marié à deux reprises, mais à chaque fois, cela s'était mal terminé: soit par une fuite au couvent, soit par la mort de la belle… Lupin se serait-il assagi avec le temps? On peut le penser.

       


      L'actualité lupinienne

       

      Le septième prix Arsène Lupin de littérature policière.
      Le septième prix Arsène Lupin de littérature policière.

       

      Le septième prix Arsène Lupin de littérature policière a été remis, le 11 mai à Étretat, à Jean-Pierre de Lucovich pour son roman Occupe-toi d'Arletty(Plon). La cérémonie était organisée au Musée du Clos Lupin, fondé en 1999 par Florence Leblanc dans l'ancienne maison de son grand-père.

      L'Aiguille creuse, l'un des chefs-d'œuvre de Maurice Leblanc, est réédité par les Éditions des Falaises dans sa version originale de 1909, qui était devenue introuvable. Le biographe de Maurice Leblanc, Jacques Derouard, signe la préface de l'ouvrage ainsi qu'un important dispositif de notes qui permet d'éclairer le lecteur sur les modifications du texte par l'auteur au fil des rééditions.

      Les Éditions Omnibus rééditent Les Aventures extraordinaires d'Arsène Lupin en trois volumes.

       

      La réédition de «L'Aiguille creuse».
      La réédition de «L'Aiguille creuse».

       

      Jean-Claude Gawsewitch Éditeur a réédité en décembre dernier, dans un beau livre avec illustrations d'époque, vingt histoires desAventures extraordinaires d'Arsène Lupin.

       

       

       

       

       

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"L'Inhumaine" de Marcel L'Herbier

Avec Georgette Leblanc, la petite soeur de Maurice, dans le rôle principal de L'Inhumaine de Marcel L'Herbier (1924)

Georgette Leblanc (1875 - 1941)

La petite soeur de Maurice Leblanc, dans ses oeuvres (1924).